Comment aller à la rencontre de celles et ceux qu’on n’entend jamais ? C’est la question que se pose depuis toujours Archipel Citoyen, et qui se repose aujourd’hui pour construire la composante citoyenne de la liste municipale 2026. Une de nos réponses : une méthode originale de tirage au sort géo-social pour alimenter notre Collège Citoyen (on vous en dira plus à propos de ce collège bientôt !).
Pourquoi s’embêter avec une méthode compliquée ?
Alors déjà, vous allez voir, ce n’est pas si compliqué. Et surtout, parce que si l’on n’avait pas ce type d’aspiration, on ne pourrait pas redonner goût et confiance dans la,politique. On ne va quand même pas simplement demander aux gens de candidater, on sait très bien comment ça fini ce genre d’histoire, avec toujours-les-mêmes.
Donc, pour constituer notre Collège Citoyen pour les élections municipales 2026, nous voulons nous donner les moyens d’inclure des personnes qu’on ne recrute pas d’habitude, et des les accompagner ensuite, mais ceci on vous en parlera dans un autre article. Ces personnes qui ont probablement le plus à dire, ou au moins autant le droit de le dire que les autres. Mais celles que l’on écoute et entend le moins. Celles et ceux aussi qui se disent “C’est pas pour moi!” ; “C’est trop compliqué” etc… Nous n’avons pas cherché à définir leur profil, ce serait forcément réducteur. Leurs profils se définissent plutôt en creux : ce sont ceux qu’on ne retrouve pas tout le temps dans la politique et les listes électorales.
Le tirage au sort géo-social que nous avons mis en place est donc un outil pour changer le principe de constitution des listes électorales en général, et de faire vivre la démocratie. Évidemment il n’est qu’une brique dans une démarche globale que nous portons, nous vous invitons à lire les autres articles du site (passés et à venir) pour ceci.
Un principe : ce que l’on vit dépend d’où l’on vit
Ce travail s’inspire (en le déformant à une maille beaucoup plus locale) du concept de classe géo-sociale, développé par Julia Cagé et Thomas Piketty (2023).
L’idée : ce que l’on vit est fortement lié à où l’on vit. Le lieu de résidence concentre et cristallise des déterminants sociaux, économiques et politiques.
Un carreau urbain peut donc porter en lui des inégalités invisibles aux échelles habituelles, et surtout permet de sortir des clichés que l’on peut avoir sur tel ou tel quartier, de la politique de la ville ou pas, pour s’ancrer dans une réalité un peu plus objectivable (loin de nous l’idée de penser que tout doit être objectivable, mais il faut avouer qu’ici cela permet de sortir des clichés).
Nous avons donc croisé des données carroyées de l’INSEE (des données statistiques disponibles à une résolution de 200 m × 200 m, soit à peine 4 terrains de foot) pour créer une valeur d’invisibilisation pour chacune de ces micro-zones. Nous utilisons ensuite cet indicateur pour tirer au sort les lieux que nous allons investiguer.
Quels critères avons-nous pris en compte ?
On pourrait en débattre des heures (on l’a fait !), on pourrait certainement même en faire un sujet de thèse (si quelqu’un le fait, tenez-nous au courant !), mais au final nous avons opté pour l’utilisation des cinq indicateurs statistiques suivants (parmi ceux limités disponibles à la maille du carreau INSEE) :
- % de ménages pauvres (avec un poids de 3 dans l’indicateur final)
- % de familles monoparentales (avec un poids de 2 dans l’indicateur final)
- % de jeunes adultes 18–24 ans (avec un poids de 1 dans l’indicateur final)
- % de logements sociaux (avec un poids de 2 dans l’indicateur final)
- % de logements collectifs (avec un poids de 1 dans l’indicateur final)
Nous avons ensuite combiné (avec la poids relatif indiqué pour chacun) ces 5 variables pour obtenir un indicateur d’invisibilisation. L’idée ici est que plus ce score est haut, plus les gens qui habitent à cet endroit ont des chances de n’être jamais représentés ou écoutés par les politiques municipales.
Tirer au sort, mais pas au hasard
Une fois les zones invisibilisées identifiées grâce à cette méthode, nous tirons 15 points au sort à l’intérieur de ces micro-zones.
Et voilà pour le tirage au sort !
Et maintenant ? Et bien ces 15 lieux ne sont qu’une première étape. Il reste désormais le plus important / difficile / intéressant, et cela va bien nous occuper sur les prochaines semaines :
- y faire du porte-à-porte,
- y organiser des goûters de bas d’immeuble,
- y discuter et écouter ce que vivent les habitantEs.
- y proposer aux gens d’être candidatEs sur la composante citoyenne de notre liste, ou alternativement de plébisciter des gens du quartier qu’ils y verraient
- les accompagner
Prochaines étapes à suivre.
Une méthode reproductible
Ce travail est documenté en sources ouvertes, notamment sur GitHub. Il peut être repris, adapté, répliqué ailleurs. N’hésitez pas à nous contacter si vous avez des questions ou envie d’en savoir plus. Vous pouvez aussi tout simplement rejoindre le mouvement Archipel Citoyen.